Thursday, August 27, 2015

Entretien avec Jesse Brown : jeune militant communautaire





SCS : J’ai entendu dire que vous avez récemment eu l’occasion de prendre part à la Conférence canadienne du Gouverneur général sur le leadership. Pourriez-vous nous en parler un peu?

Jesse : J’ai entendu parler pour la première fois de la conférence par une supportrice de YouthCO qui y avait participé en 1991. Elle disait que l’expérience avait été transformatrice et m’encourageait à postuler.

J’ai donc rempli le formulaire de candidature, puis j’ai été appelé en entrevue et j’ai eu la chance de faire partie des 30 candidats choisis en Colombie-Britannique.

Le thème de la conférence était « Leadership et innovation »… Ils étaient à la recherche de gens qui font preuve de leadership ou d’idées novatrices dans leur domaine. En entrevue, j’ai décrit les programmes et projets novateurs que nous avons développés chez YouthCO au cours de mon mandat de directeur général, comme le projet Mpowerment, notre programme de sensibilisation et d’éducation sur le VIH, et Know On The Go, la première clinique mobile de santé sexuelle et de dépistage du VIH au Canada.
J’ai aussi signalé que YouthCO est un des rares organismes dirigés par des jeunes, au pays, qui créent des occasions de leadership avant-gardistes pour ceux-ci.

SCS : Que voulez-vous dire par « occasions de leadership pour les jeunes »?

Jesse : Je parle du mentorat et de la planification de la relève chez YouthCO. Tout le monde a moins de 30 ans, dans l’organisme; ça implique de se concentrer sur des domaines au-delà du recrutement, de la formation et du mentorat. 
Nous sommes en quelque sorte une fabrique à leadership... Des centaines de personnes ont été éduquées sur le VIH et travaillent à présent pour divers organismes de lutte contre le sida et d’autres organismes d’éducation et de santé. En fait, YouthCO a une longue liste d’anciens… et nous en sommes très fiers.


SCS : On dit que la Conférence canadienne du Gouverneur général sur le leadership utilise des approches novatrices. Pourriez-vous nous parler de son déroulement?

Jesse : Plus de 200 participants y sont venus de partout au Canada. Nous avons d’abord eu une réunion de trois jours à St. John’s, Terre-Neuve, où divers leaders communautaires se sont adressés à nous. Le conférencier invité, l’astronaute Chris Hadfield, était fabuleux. Il nous a fascinés en expliquant le haut niveau de leadership requis pour commander la station spatiale internationale.

Par la suite, nous avons été répartis en groupes d’étude pour visiter chaque province et territoire du Canada. Trois groupes ont été assignés à diverses régions de l’Ontario... Je faisais partie de la Visite d’étude du Nord de l’Ontario. Nous étions généralement occupés de 6 h le matin à 23 h le soir… Un officier de liaison militaire s’occupait de notre horaire. Nous visitions des villes et des villages et arrêtions à divers endroits pour découvrir des projets novateurs – la plupart visant à stimuler l’économie – en particulier pour les jeunes de la région.

Il y avait aussi un point de mire clair sur l’implication des populations indigènes dans le Nord de l’Ontario, et sur le défi de les joindre dans une région dont la superficie est comparable à celle de la France. Et nous en avons beaucoup appris sur les résultats de santé dans la région.

SCS : Combien de villes avez-vous visitées dans le Nord de l’Ontario?

Jesse : Nous en avons vu plusieurs : North Bay, Sudbury, Sault Ste. Marie, Timmins et Red Lake. Puisque les distances à parcourir sont énormes, nous avons dû prendre l’avion à quelques occasions, avec Bearskin Airlines.
Nous avons eu la chance de vivre un vrai « samedi soir à Sudbury » (comme dans la chanson de Stompin’ Tom), où nous avons assisté à la prestation d’un groupe musical local.

À Red Lake, nous avons visité une mine Goldcorp. L’expérience a été renversante. Pour mettre les choses en perspective, la hauteur du puits de la mine est le triple de celle de la Tour du CN. Je n’avais jamais vu une mine opérationnelle. L’exploitation minière a un impact majeur sur l’environnement et les communautés locales. La visite a assurément éclairé à mes yeux la controverse entourant les coûts-avantages de l’exploitation minière.

SCS : Quels sont les points saillants de votre expérience?

Jesse : Je crois que j’ai surtout appris à me connaître. J’ai interagi avec des gens ayant une expérience et un parcours très différents des miens... Des représentants d’entreprises et de syndicats, de jeunes dirigeants du secteur de l’énergie, des propriétaires de petites entreprises, des fonctionnaires, des individus du secteur à but non lucratif comme moi... avec des opinions allant d’un bout à l’autre de l’éventail politique.
J’ai trouvé révélateur de visiter des régions très rurales du pays. J’ai réalisé que je vivais un peu dans une bulle, à Vancouver – et que les enjeux, les perspectives et les défis peuvent varier grandement de ceux des centres urbains.
Sur le plan personnel, le fait d’être la seule personne gaie de la Visite d’étude du Nord de l’Ontario m’a permis de me mettre au défi. Par exemple, nous avons visité une église nouvellement construite qui était plutôt novatrice de par sa structure unique de dôme en béton.

L’église appartenait à une congrégation baptiste; après notre visite, nous avons eu l’occasion de poser quelques questions au ministre. Je trouvais important de lui demander quel accueil est réservé aux personnes LGBT dans sa congrégation. Il m’a répondu qu’il s’agit d’une église conservatrice, qui considère que le mariage devrait être seulement entre un homme et une femme, et qu’il pourrait être inconfortable pour une personne gaie d’assister à ses services religieux. Cette réponse ne m’a pas surpris… mais je trouvais important d’apporter ma perspective, pour que le reste du groupe entende la réponse et en bénéficie. Cette expérience unique a resserré encore plus nos liens.


SCS : Il semble que le fait de passer autant de temps ensemble ait rapproché les membres du groupe.

Jesse : Oui, tout à fait. Nous avons passé dix jours ensemble. J’ai été étonné qu’on puisse développer une amitié profonde avec des gens qui n’auraient probablement pas fait partie de notre cercle habituel – et qui ont parfois des perspectives ou des opinions politiques très différentes des nôtres.

SCS : Quelles impressions garderez-vous de votre expérience?

Jesse : Cette expérience enrichissante a ouvert mes horizons et m’a fait réaliser qu’il peut exister un auditoire plus large pour nos messages de justice sociale et de changement social.

Ça a aussi été révélateur pour moi de voir une partie du pays qui n’offre pas les mêmes possibilités naturelles que Vancouver. J’ai pris conscience que je vivais un peu dans une bulle, à Vancouver, où des choses comme la réduction des méfaits ou l’accès aux traitements sont déjà acquises, alors qu’elles peuvent être encore matière à débat dans d’autres régions du pays.

Je me trouve chanceux d’être né et d’avoir grandi à Vancouver. Il est sûrement plus difficile, en tant que gai, de grandir à Thunder Bay ou à Red Lake... où les possibilités et les services sont plus limités.

SCS : Que diriez-vous à quelqu’un qui envisage de postuler à la prochaine Conférence canadienne du Gouverneur général sur le leadership?

Jesse : La prochaine conférence est dans deux ans. Je dirais que c’est une excellente occasion de développement personnel et de découverte de notre pays. Je recommande fortement l’expérience à toute personne désireuse de susciter des changements positifs dans la société.

SCS : Merci d’avoir pris le temps de partager vos expériences avec nous.

Jesse : Merci de votre intérêt.


A Conversation with Jesse Brown: Community Youth Advocate



Jesse Brown


CAS: I hear that you recently had an opportunity to be part of the Governor General’s Canadian Leadership Conference. Can you tell us a little about it?

Jesse: I first heard about the conference from a YouthCO supporter who was an alumni of the conference in 1991. She said that it was a transformative experience for her and suggested that I apply.

So I threw my hat in the ring, wrote the application, was chosen for an interview and was fortunate to be one of 30 people selected from BC.


The theme of the conference was Leadership and Innovation … so they were looking for people who demonstrated leadership or innovative ideas in their field. During my interview I highlighted the innovative programs and projects that we developed at YouthCO during my tenure as Executive Director such as the Mpowerment project which is our HIV awareness and education program and Know On The Go which was Canada’s first mobile sexual health and testing clinic for HIV.

I also stressed that YouthCO is one of the few youth-led and youth-driven organizations in the country that is creating cutting edge leadership opportunities for youth.

CAS: What exactly do you mean by creating leadership opportunities for youth?

Jesse: We’re really talking about mentoring and succession planning at YouthCO. Everyone in the organization is under the age of 30 and it requires us to focus in areas beyond recruitment, training and the mentoring of people. 
We are in a sense a bit of a leadership factory ... hundreds of people are now educated about HIV and have moved on to work at various AIDS Service Organizations and other educational and health organizations. In fact we have a really extensive alumni at YouthCO … and we’re quite proud of that.


CAS: I hear that the Governor General’s Canadian Leadership Conference itself is innovative in its approaches. Can you tell us how it worked?

Jesse: Well, there were over 200 participants from across Canada. We first met in St. John’s, Newfoundland where for the first three days we heard several presentations and speeches by various community leaders. The keynote speaker was the astronaut Chris Hadfield. He was fabulous as he mesmerized us with the high stakes leadership that is required to command the international space station.

From there we were divided into study groups to visit each of Canada’s provinces and territories. Three groups were selected to tour various parts of Ontario ... and I was selected for the Northern Ontario Study Tour. We were usually busy from 6 am to 11 pm … we had a military liaison officer who kept us on schedule.  We would visit different towns and cities throughout the region and stop at different sites to learn about innovative projects – much of it focused on how to get the economy kick-started – particularly for young people in the region.

There was also a clear focus on how to engage with indigenous populations in Northern Ontario and the challenges of reaching out to them in an area that is about the size of France. And we learned a lot about health outcomes for the region.

CAS: How many towns did you visit in Northern Ontario?
Jesse: We saw a lot of it: North Bay, Sudbury, Sault Ste. Marie, Timmins and Red Lake. The distances are enormous so we had to fly to some locations using Bearskin Airlines.
In Sudbury we had the opportunity for a real live “Sudbury Saturday Night” just like the Stompin’ Tom song and heard a local band play.

And in Red Lake we visited a Goldcorp Mine. That was a mind-boggling experience. To put it in perspective, the mine shaft itself is three times the height of the CN Tower. I had never seen an operational mine before. Mining has a huge impact on the environment and on local communities. It definitely clarified for me the controversy surrounding the cost-benefits of mining.


CAS: What would you say were the highlights of your experience?

Jesse: I feel that I mostly learned a lot about myself. I engaged with people from very different backgrounds and experiences from my own ... business and union leaders, young executives working in the energy sector, small business owners, civil servants, people from the not-for-profit sector such as myself ... and a diversity of views from across the political spectrum.

It was also eye-opening to go to a really rural part of the country. It made me realize that I live in a bit of a bubble in Vancouver – and that issues, perspectives and challenges can be vastly different than they may be in urban settings.

On a very personal level, being the only gay person on the Northern Ontario tour, it was an opportunity to challenge myself. For example, we visited a newly built church that was quite innovative in itself – it was a rather unique concrete dome structure.

It turned out to be a Baptist congregation and after the tour of the building we had an opportunity to ask a few questions of the Minister. I felt it was important to ask about the reception they gave to LGBT people in their congregation.  The Minister replied that they were a conservative church that believes marriage should only be between a man and a woman and that it might be uncomfortable for gay persons to attend their services. The answer didn’t surprise me … but I thought it was important to bring my perspective to bear so the rest of the group could hear the answer and learn from it. That was a unique experience that actually helped our group bond even closer together.


CAS: It sounds like spending so much time with these people on your tour must have been quite an experience for the group.

Jesse: Indeed it was. We spent ten days together on the tour. It was somewhat surprising to me that we would develop close friendships with people who might not be part of our usual circle of friends – and sometimes with those having quite different perspectives or political views.

CAS: What would you say are your lasting impressions of your experience?

Jesse: I think I walked away enriched by an experience that expanded my horizons and made me realize that there can be a wider audience for our messaging of social justice and social change.

It was also certainly eye-opening for me to see a part of the country that does not have the natural opportunities that Vancouver has. And it made me realize that I live in a bit of a bubble in Vancouver where issues like harm reduction or access to treatment are pretty much a given where I live – but these can still be very much up for debate in some other parts of the country.

I do feel lucky to have been born and raised in Vancouver. It would certainly be far more challenging to grow up gay in Thunder Bay or Red lake ... where options and services are clearly more limited.

CAS: What would you tell anyone else who might be thinking of applying to the next Governor General’s Canadian Leadership Conference?

Jesse: There will be another conference in two years time. I would say that it's a great opportunity for personal growth and to get to know more about your country.  I would highly recommend the experience to anyone who is keen on creating positive change within society.

CAS. Thank you for taking the time to share your experiences with us.

Jesse: I really appreciate you taking an interest.